L'indice d'un milieu réfringent varie avec la longueur d'onde de la lumière utilisée. En dehors des bandes d'absorption du matériau, on montre à partir des équations de Maxwell que la variation de l'indice avec la longueur d'onde est de la forme :
n(λ) = A + B / λ2 + C / λ4 + ... (relation trouvée empiriquement par Cauchy). On peut aussi traduire cette variation par la relation empirique de Sellmeier :
n2(λ) = 1 + B1λ2 / (λ2 − C1) + B2λ2 / (λ2 − C2) + B3λ2 / (λ2 − C3)
Liquides
On utilise maintenant des lentilles constituées de liquides non miscibles (eau et huile) dont on peut faire varier la forme du dioptre de l'interface avec une tension électrique (phénomène d'électromouillage) et ainsi modifier la distance focale.
Verres minéraux
Ils sont obtenus par fusion de silice additionnée d'acide borique, de phosphates, de fluorures avec des carbonates de calcium, sodium, potassium ou des oxydes de plomb ou d'alumine. Les verres sont constitué des chaînes tridimensionnelles de SiO4 ou BO3 avec dans les lacunes des ions K+, Ca++, Na+, Ba++ ou Pb++.
On classe les verres optiques en crown (silicates double de potassium et de calcium) et flints (silicates double de potassium et de plomb).
La déviation de la lumière par un prisme augmente quand on passe du rouge au violet : l'indice augmente quand
la longueur d'onde diminue.
Il est d'usage de désigner certaines radiations caractéristiques par des lettres :
Pour un prisme de petit angle A, les déviations pour les raies C, D et F sont respectivement :
ΔC = (NC − 1).A ΔD = (ND − 1).A ΔF = (NF − 1).A
On peut caractériser la variation relative de la déviation par le rapport
(ΔF − ΔC) / ΔD = (NF − NC) / (ND − 1) = 1 / ε
Le pouvoir dispersif (ou constringence) du verre 1 / ε = (NF − NC) / (ND − 1)
caractérise la dispersion du verre.
ε est d'autant plus petit que le verre est plus dispersif.
ε souvent écrit ν (nu) est aussi appelé nombre d'Abbe.
Quelques exemples | ||||
---|---|---|---|---|
F | D | C | ε | |
Crown N-BK10 | 1,50296 | 1,49775 | 1,49552 | 67 |
Flint N-F2 | 1,63208 | 1,61990 | 1,61506 | 36 |
Sel | 1,5533 | 1,5442 | 1,5406 | 35 |
Fluorine | 1,4370 | 1,4338 | 1,4325 | 95 |
Eau | 1,3371 | 1,3330 | 1,3311 | 56 |
L'expression de la vergence d'une lentille mince est donnée par :
Elle est fonction de l'indice et varie donc avec la couleur de la lumière. La distance focale diminue quand on passe du rouge au violet. Comme la position du centre optique ne dépend que de la géométrie de la lentille, pour une lentille éclairée en lumière blanche, il y aura une infinité de foyers compris entre un foyer violet F'v et un foyer rouge F'r.
La position de l'image d'un objet AB varie entre A'vB'v et A'rB'r. L'effet du chromatisme de la lentille agit à la fois sur la position et sur la dimension de l'image : il y a un chromatisme de position et un chromatisme de grandeur.
L' aberration chromatique longitudinale principale a est la distance F'vF'r.
On peut écrire que la distance focale est 1 / f ' = (N − 1).A
En prenant comme extrémités du spectre les raies C et F, on a :
1 / f 'r = (NC − 1).A 1 / f 'v = (NF − 1).A 1 / f ' = (ND − 1).A
1 / f 'v − 1 / f 'r = (f 'r − f 'v) / f 'r.f 'v = (NF − NC).A = (NF − NC) / (ND − 1). f ' = 1 / ε.f '
On tire a / f '2 = 1 / ε.f ' soit a = f ' / ε
L' aberration longitudinale principale a est proportionnelle à la distance focale f ' et au pouvoir dispersif du verre 1 / ε mais ne dépend pas du diamètre de la lentille. Elle peut varier de f ' / 66 pour un crown peu dispersif à f ' / 33 pour un flint très dispersif.
Aberration chromatique transversale principale
Quand on déplace un écran normal à l'axe la section du faisceau n'est jamais ponctuelle. Cette section est une tache blanche avec des irisations.En avant de F'r, elle est bordée de rouge et elle est bordée de violet au delà de F'v. La position PQ correspond au minimum du diamètre. C'est l'aberration chromatique transversale principale.
La comparaison des triangles semblables IF'vJ et PF'vQ puis IF'rJ et PF'rQ donne en confondant OF'v et OF'r avec OF' :
PQ / IJ
= F'vF' / OF' =F'rF' / OF' = F'vF'r / 2.OF' soit PQ / IJ = a / 2.f ' ou encore PQ = IJ / 2.ε
L' aberration transversale principale est proportionnelle au pouvoir dispersif du verre 1 / ε, au diamètre d'ouverture de la lentille mais ne dépend pas de la distance focale de la lentille. On peut la réduire en diaphragmant la lentille.
Illustration des aberrations
Données utilisées :
On suppose la lentille corrigée des aberrations géométriques. Distance focale pour la raie d : 40 cm
Les valeurs utilisées correspondent aux verres SCHOTT N-F2 (flint avec A =36,43) et N-KB10 (crown avec A = 67)
Raie | r (Hélium) |
C (hydrogène) | d (Mercure) |
e (Mercure) |
F (hydrogène) | g (Mercure) |
h (Mercure) |
Longueur d'onde (nm) | 706,5 | 656,3 | 587,5 | 546,1 | 486,1 | 435,8 | 404,6 |
N-F2 (flint) | 1,61229 | 1,61506 | 1,62005 | 1,62408 | 1,63208 | 1,64209 | 1,65087 |
N-BK10 (crown) | 1,49419 | 1,49552 | 1,49782 | 1,49960 | 1,50296 | 1,50690 | 1,51014 |
Principe du doublet achromatique
Le système est achromatique si tous les foyers sont confondus. Ceci ne peut être réalisé qu'en utilisant plusieurs lentilles. On examine le cas d'un doublet de lentilles minces accolées L et L'.
En passant de la raie C à la raie F, les vergences des lentilles L et L' varient de A.(NF − NC) à A'.(N'F − N'C) avec
1 / f =
A.(ND − 1) et 1 / f '=
A'.(N'D − 1)
La variation totale de convergence est ΔV = A.(NF − NC) + A'.(N'F − N'C)
ΔV = (NF − NC) / (ND − 1).f + (N'F − N'C) / (N'D − 1).f ' = V.(NF − NC) / (ND − 1) + V'.(N'F − N'C) / (N'D − 1)
Les foyers rouge et violet sont confondus si ΔV = 0 donc si : V / ε + V' / ε' = 0.
Conséquences
La vergence désirée étant V0 = V + V', on en déduit que D = D0.ε / ( ε − ε') et D' = D0.ε / ( ε' − ε).
Les distances focales calculées pour obtenir l'achromatisme pouvant être obtenues avec une infinité de formes différentes de lentilles les combinaisons retenues doivent aussi permettre la correction des aberrations géométriques du système.
Parmis les nombreuses réalisations de doublets achromatiques citons :
- le doublet Littrow CV crown R1 = R2, DV flint R3 = − R2, R4 = ∞
- le doublet Clark
CV crown R1 = R2, DV flint R3 ≈ − R2, R4 >> R3
- le doublet Fraunhofer CV crown R1 > R2, DV flint R3 ≈ − R2, R4 > R3 ...
Il faut que les rayons
de courbure de la face de sortie de la première lentille et de la face d'entrée de la seconde soit identiques pour supprimer un interface verre-air-verre.
Spectre secondaire
Le doublet est achromatique pour les raies C et F. Il l'est pour un couple λ
et λ + dλ
si dV = 0 pour ces deux longueurs d'onde donc si A.dN +A'dN' = 0 ou AN + A'N' = Constante.
Cette relation implique
que la courbe N' = f(N) est une droite condition réalisée par certains verres récents.
Dans le cas général,
la courbe N' = f(N)
n'est pas une droite et il reste un étalement résiduel des foyers appelé spectre secondaire.
Exemples de doublets achromatiques
Pour une valeur donnée de la distance focale du doublet pour la raie d, ce programme détermine la distance focale pour chacune des autres raies. Il permet de choisir la distance focale de la lentille de crown qui donne l'aberration chromatique longitudinale minimale.
Choisir la valeur de la distance focale Fd du doublet pour la raie d avec le premier curseur.
Choisir la valeur de la distance focale Fc de la lentille en crown avec le second curseur. La valeur de la distance focale de la lentille de flint est déduite des relations :
D = D0.ε / (
ε − ε') et D' = D0.ε / (
ε' − ε).
Le dernier curseur permet de choisir la valeur de la longueur d'onde (raies r, C, d, e, F, g ou h).
Les verres utilisés sont un crown N-KB 10 et un flint N-F2
Trois curseurs permettent la sélection de la valeur de la distance focale Fd du doublet pour la raie d ainsi que les valeurs des distances focales Ffd (flint) et Fcd (crown) des deux lentilles qui constituent le doublet.
Le programme trace en bleu la courbe donnant la variation de la distance focale Ff(λ) d'une lentille en flint pour laquelle Ffd est égale à Fd en fonction de la longueur d'onde, en jaune la courbe Fc(λ) pour une lentille en crown.
La courbe rouge correspond à la courbe F(λ) du doublet résultant de cette association.
Attention : cette courbe n'est visible que dans la plage
(Fd − 6 cm)-(Fd + 2 cm).
Le bouton [Réponse] affiche les valeurs optimales de
Ffd et Fcd déduites des relations :
D = D0.ε / (
ε − ε') et D' = D0.ε / (
ε' − ε).
On peut constater que même si cette condition n'est pas réalisée, l'association des deux lentilles diminue fortement l'aberration chromatique longitudinale.
Triplets apomatiques
Le triplet apochromatique est une version améliorée du doublet achromatique pour assurer la correction des aberrations chromatique et sphérique.
Dans un achromat on se limite à la correction des distances focales pour deux longueurs d'onde différentes (généralement rouge et bleue). L'apochromat permet de corriger les distances focales pour trois longueurs d'onde différentes. La dispersion résiduelle des couleurs est moindre que celle produite par un achromat, à ouverture et distance focale équivalentes. L'apochromat permet aussi de corriger les aberrations sphériques sur deux longueurs d'onde, contre une longueur d'onde avec l'achromat.
La fabrication d'un apochromat nécessite des verres optiques de constringences spéciales pour parvenir à ce résultat. On utilise généralement des verres en crown et de la fluorine.
Ce matériau d'indice assez faible (Nc = 1,4325) présente une forte constringence (95).
Achromatisme apparent d'un oculaire
On utilise souvent des oculaires constitués de deux verres non accolés constitués d'un même verre pour observer l'image donnée par un objectif supposé corrigé de l'aberration chromatique longitudinale.
L'image AB (blanche) donnée par cet objectif se forme dans le plan focal objet de l'oculaire et l'image finale est alors à l'infini.
Dans un tel oculaire, il y a la fois dispersion des plans principaux et des foyers.
La composante rouge de l'image est vue sous l'angle
αr, la composante bleue sous l'angle αv. Pour que l'observateur voit une image blanche, il faut que toutes les composantes soient vues sous le même angle α.
Or αλ ≈ AB / fλ .
Il y aura donc achromatisme (seulement apparent)
si fλ ne dépend pas de la longueur d'onde donc si d(1 / f) = 0.
Pour un doublet d'épaisseur e avec des lentilles de distances focales f1 et f2 , on a : 1 / F = 1 / f1 + 1 / f2 − e / f1.f2
df1 / f12 + df2 / f22 − (df1 / f1 + df2 / f2).e /f1.f2 = 0.
Les lentilles étant identiques
on a: df1 / f1 = df2 / f2 = c
Donc c / f1 + c /f2 − 2.e.c / f1.f2 = 0 et finalement
f1 + f2 = 2e.
Cette relation est verifiée pour les oculaires de Huygens (doublets de formule 3, 2, 1 ou 4, 3, 2)